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La loyauté plutôt que les convictions
dimanche 5 juin
« J’ai mis mes convictions de côté, parce que lorsqu’on est marqué comme moi par le 21 avril, on ne peut pas souhaiter une nouvelle crise pour les partis de gouvernement » Cette phrase est de Manuel Valls (France-Info, 21 mars 2005), partisan du non ayant choisi de s’écraser devant la majorité. (...)
 
La foi de François Hollande
mardi 31 mai
Incroyable : le 26 mai 2005, François a laissé échapper sur France Culture les raisons qui auraient pu le pousser à voter non ! Encore une preuve supplémentaire de l’opportunisme du oui socialiste, et également une preuve de la "nécessité" de ce traité maintenant et en (...)
 
Non, c’est non : merci David pour ces précisions
lundi 30 mai
Simple et efficace, cette petite analyse de David Abiker sur le Big Bang Blog. Parce que nos hommes politiques ont tortillé dans tous les sens pour savoir comment il fallait interpréter le oui...
 
L’autisme jusqu’au bout
lundi 30 mai
On savait depuis longtemps que Serge July avait renoncé à ses idées de gauche. On le savait également complice de toutes les connivences médiatico-politiques, ce qui s’est vérifié sur cette campagne.
Mais ce matin, il passe encore un cap : il se montre incapable de prendre acte du vote des (...)
 
De "1984" au "modèle social européen" de 2005
lundi 23 mai
J’imagine que c’est se comporter en archaïque irresponsable que de comparer le mode de construction de l’Europe des 25 avec l’Etat monolithique du 1984 de Georges Orwell. Pourtant, Alain Bihr l’a fait, et brillamment en plus. Ca fait réfléchir. Je ne saurais que trop conseiller la lecture de (...)
 
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le mensonge social de la constitution
Article sur la manière dont s’opère la manipulation de l’opinion dans le projet de constitution européenne. Par un chercheur du CNRS, quand même...
Lecture de la constitution par mots-clés
Excellent site permettant une recherche dans le texte intégral de la constitution en hypertexte, par mots-clés, par mots les plus fréquent, etc. ainsi qu’une liste à télécharger de tous les mots-clés de la constitution ! De quoi prendre courage face aux 528 pages du texte
Post-referendum, animal triste
Fin de partie
samedi 4 juin 2005
par Pierre-Jérôme Adjedj
popularité : 95%
Depuis le 29 mai, je suis atteint d’une lassitude qui m’empêche de mettre le blog à jour. Les activités professionnelles y sont pour quelque chose, mais ça ne peut pas être la seule raison...

Je pense que j’ai fini par comprendre que j’étais atteint d’un mal qui doit en frapper plus d’un : une sorte de blues post-référendaire. J’ai bien eu quelques soubresauts d’énervements en lisant les éditos de la sainte trinité ouiste (Colombani, July, Val), mais j’ai reporté aux calendes (donc à jamais parce que l’événement est périssable) l’article incendiaire que je comptais écrire sur l’édito du dernier cité.

Et le problème est là, justement : un article incendiaire, pourquoi faire ? Pour hurler une fois de plus ma déception de voir Philippe Val transformé en social-démocrate tiède ? Ca serait peut-être justifié, mais à quoi bon agiter une polémique de plus ? Parce que justement, contrairement à nos chers éditorialistes d’élite qui sont enfermés dans le cercle vicieux où ils se sont eux-même inscrits, je me dis que la polémique ne peut pas tenir lieu de vie intellectuelle. Après tout, je n’ai rien à vendre, et je préfère amplement reprendre le cours de réflexions plus universelles. Dès mercredi, jour où les contorsions des leaders ouistes de gauche et de droite se sont faites plus fortes pour nous faire avaler qu’ils étaient encore les hommes et femmes de la situation, mon intérêt pour tout ce cirque a décru. Précisément parce que ce nouveau gouvernement n’est qu’un Raffarin IV, parce que tout le monde fait mine de tirer des leçons du non sans joindre le geste à la parole, recommençons une lutte de fond sans s’accrocher à toutes les gesticulations des journalistes et des politiques.

Et puis non, il faut tout de même que je parle de l’édito de Philippe Val, pour soulever quand même le procédé honteux qu’il emploie. Après, c’est promis, j’arrête.

Pour ceux qui ne l’ont pas lu, l’édito en question est une lettre ouverte où l’auteur en appelle à son ami Daniel Cohn-Bendit et à la mémoire de mai 68 : il célèbre Dany le Rouge, agitateur de cette france rance trop bien rangée, ou même la gauche était castrée, puisque limitée aux affreux communistes : « Jusqu’à mai 68, être de gauche et anticommuniste en France - malgré le vieux congrès de Tours - relevait un peu du défi. » Première nouvelle : donc, 68 et Dany nous ont essentiellement débarrassé des communistes, le reste étant anecdotique. Et tout l’article fonctionne sur ce principe des rapprochements anachroniques, qui permettent de blâmer les nonistes de gauche comme de droite en les mettant dans un même sac xénophobe, passéiste, égoïste et j’en passe. Extraits.

« Et je me souviens avec une vraie nostalgie, moi qui ne suis jamais nostalgique [1], du principal slogan de mai 68 (...)l’admirable affirmation de tous les insurgés de l’époque : « nous sommes tous des juifs allemands » Imaginerait-on aujourd’hui l’extrême-gauche et les mouvements comme ATTAC, devenus copains avec Tariq Ramadan, clamer un pareil slogan ? Si la société a progressé, notamment grâce à la période que tu as incarnée, on mesure aujourd’hui à l’impossibilité d’un slogan pareil la vertigineuse régression dont souffre notre pays. » Et voilà, toute personne de gauche et partisane du non est réduite à un régressif antisémite. Désolé de te décevoir, mon Philippe, mais je suis juif, européen, pour l’abandon de la souveraineté nationale à certaines conditions et pourtant partisan du non : et je ne vois pas en quoi c’est une marque de progrès de crier « nous sommes tous des juifs allemands, ou juifs israéliens, ... » Après tout, je ne t’ai jamais entendu crier nous sommes tous des rwandais. Quant à ce triste sire de Tariq Ramadan, un boulevard lui est certes ouvert par une partie de la gauche bien pensante trop ouvertement et trop unilatéralement pro-palestinienne, mais également par les éditorialistes et intellectuels trop ouvertement pro-israéliens qui contribuent à exciter les musulmans de France, même les plus modérés (je pense à Adler stigmatisant les « traîtres juifs », Finkielkraut et sa dénonciation de la « créolité » dangereuse pour les juifs, et j’en passe). Ce raisonnement est valable pour Dieudonné et tous les agitateurs de ce genre.

« Daniel, tu reviens régulièrement dénoncer le populisme, les mensonges démagogiques et la vieille démangeaison réactionnaire de notre pays (...) Lors du remarquable débat animé par Arlette Chabot sur France 2, jeudi dernier, Marie-Georges Buffet déroulait l’habituel logiciel communiste qui conteste que des étrangers puissent intervenir dans le débat pour dire à notre peuple ce qu’il faut penser de l’Europe. Et tu t’es vu, quarante ans après mai 68, contraint de constater de nouveau avec toute la mélancolie du monde : je sais, Marie-Georges, je suis un juif allemand. » Moi qui n’ai ni aversion ni sympathie pour le PC, je dois dire que ton argument, quelle que soit sa justesse, occulte un point important : Les cocos n’ont apparemment pas changé, mais Dany, lui, a changé. Il est devenu une icône libérale qui croit au marché ; et si Fabius ne me convaint pas une seconde parce que son choix est opportuniste comme l’était celui de Séguin sur Maastricht, ça ne fait pas pour autant de Dany un progressiste convaincant. Et ce recours au martyr (je sais, je ne suis qu’un juif) est un bouclier qui protège bien des malhonnêtetés. C’est à mon avis une preuve de liberté intellectuelle de savoir se faire traiter de con sans se défendre en traitant l’interlocuteur d’antisémite.

« Le passé totalitaire dont sont issus certains courants politiques actuels - les mêmes qui ont empêché en 1954 la fondation de l’Europe politique et qui viennent de recommencer - n’est même plus un sujet de débats. Avoir admiré Staline, Mao, Enver Hodja est non seulement amnistié, mais devient insensiblement aujourd’hui une preuve de sympathique bon sens politique. Hitler, c’est trop tôt, parce qu’on n’a pas encore la certitude qu’il était de gauche, mais les recherches sont en cours. » Je me demande si Philippe Val mesure bien la portée de ce qu’il dit : si je décrypte, il résume le camp du non de gauche à un ramassis de « Stal’ » et de nationaux-socialistes potentiels. Pourtant, il se plaint un peu plus tôt dans son article de « la tonalité de [son] courrier - insultes, exclusions, lettres anonymes [le] traitant de nazi ». Et lui, qu’est-ce qu’il fait ? Avec les moyens qui sont les siens, une tribune bien exposée, il insulte, en signant il est vrai, des milliers d’anonymes en les traitant de rouge-bruns. C’est déplorable. Cette manière d’invectiver pour éviter de se remettre en question, ça me rappelle Jospin.

Jospin, dont notre cher Philippe dit justement : « Jospin, qui n’avait peut-être pas que des qualités, avait néanmoins fait diminuer d’un million le nombre de chômeurs. Pour le récompenser, la gauche pure a tellement bien voté que Le Pen est arrivé au deuxième tour. » Donc, ce sont les électeurs qui ont mal voté ? Jospin a dit exactement la même chose. Rassure-moi, tu as voté Chirac au deuxième tour au moins ? Parce que moi non, j’ai voté blanc. Ca me rappelle une anecdote, racontée par un ami discutant avec un collègue de science-po : le premier dit « les français n’ont pas mérité Jospin », à quoi mon ami a répondu « personne ne mérite Jospin ». Je pense que ça ne te fera pas rire, Philippe, alors que pourtant tu as (ou avais) de l’humour.

Philippe Val finit son édito en se résignant à un repli « entre-soi », avec cette minorité de gens intelligents épris de la vraie liberté : il prend le maquis et rassure Dany Cohn-Bendit sur la nécessité de sa présence dans le débat français. Mais je me demande dans quelle mesure, son édito reposant sur l’analogie avec Dany, Philippe Val n’essaie pas de nous (se) convaincre de sa propre utilité ? De plus, l’évocation de cette minorité martyre est un moyen commode d’escamoter la majorité médiatique écrasante qui a été celle du oui durant toute la campagne, et dont Val a été un des acteurs.

Mais je suis d’accord quand il parle de reprendre la réflexion, ce qui est précisément l’appel que je m’étais auto-lancé en début d’article. Sur ce terrain, et à égalité, je serai toujours prêt à débattre, avec lui et avec d’autres. Mais comme je doute qu’il m’ouvre une tribune dans "Charlie", il faudrait pour cela qu’il reconnaisse qu’un débat est possible sur Internet, ce qui n’est pas gagné.

« Il paraît que le résultat du référendum, c’est aussi le rejet des éditorialistes de l’élite... Mais c’est aussi une victoire d’Internet contre la presse, et le triomphe des opinions sur les idées, ce qui n’est une bonne nouvelle pour personne. »

Mon cher Philippe, le jour où tu surmonteras cette peur d’Internet et cet a priori, tu gagneras en liberté, puisque tu assumeras que tes lecteurs aussi puissent avoir un cerveau en état de marche. Et en plus, ça te démarqueras des Colombani, July et autres charlots.

 
Post Scriptum :
J’avais dit que je ne parlerais pas de Philippe Val, mais le coup est parti tout seul. Mon Philippe, si tu lis cet article, il est important que tu saches que je suis un fan ABSOLU de Font et Val et de tes premières années Charlie, et que j’aime toujours ce que tu étais autant que j’exècre tes positions actuelles. Si seulement tu faisais un tant soit peu machine arrière : mais est-ce possible ?

[1] il est amnésique même, puisque sa discographie ne mentionne pas sa longue collaboration -vingt ans tout de même avec Patrick Font

Messages de forum :
> Post-referendum, animal triste
jeudi 17 novembre 2005
par  Seb

Je suis très surpris. Non pas que l’on ne soit pas d’accord avec Philippe Val, mais sur la nature des critiques que je constate : avez-vous bien lu ?

Tout noniste n’est évidemment pas accusé d’antisémitisme ou de stalinisme. Simplement, ce que Val explique, c’est que les nonistes de gauche ont préféré lutter contre le prétendu diable libéraliste contenu dans la Constitution, au risque de dire non à ce qui fait l’histoire de l’Europe depuis des siècles : le laos, le cosmopolitisme, etc ... Et il y a de Mai 68 à la chute du Mur de Berlin un continuum de pensée qui se dégage pour sortir la gauche du piège de l’utopie communiste. Et son discours est de demander pourquoi avoir peur du libéralisme tant que l’on reste dans une social-démocratie ? Vous avez le droit d’en avoir peur, mais il n’y a pas d’insulte dans les propos de Val.

Jospin ? Là encore relisez : "Jospin, qui n’avait peut-être pas que des qualités". Ca veut bien dire ce que ça veut dire. Donc oui l’échec de Jospin en 2002 est du au vote éparpillé de la gauche, à la campagne de la droite sur l’insécurité, à tout ce que l’on veut, mais aussi, Val le dit, à Jospin. Je ne vois chez Jospin aucune auto-critique. Mais Val ne fait pas de Jospin un homme parfait victime de l’imbécilité populaire.

Enfin sur la minorité martyre ... j’ai envie de dire que c’est de bonne guerre. Hé oui, pendant toute la campagne, les tenants du oui ont été traités d’infâmes majoritaires (propagandistes et élitistes). Maintenant que nous sommes en minorité ... avouez qu’on a le droit de le dire que nous sommes en minorité :-) Ca n’avance à rien, ce n’est pas très malin, comme de nous avoir critiqué d’infames majoritaires, mais on ne peut pas critiquer quelqu’un pour des procédés que l’on emploie.

Cordialement



    > Post-referendum, animal triste
    vendredi 18 novembre 2005
    par  Pierre-Jérôme Adjedj

    Bonjour Seb.

    Tout d’abord milles excuses quant à la lenteur de la validation et de la présente réponse : je n ’ai pas mis le nez dans mon blog depuis plusieurs jours, faute de temps... Venons-en à votre message.

    « Le passé totalitaire dont sont issus certains courants politiques actuels - les mêmes qui ont empêché en 1954 la fondation de l’Europe politique et qui viennent de recommencer - n’est même plus un sujet de débats. Avoir admiré Staline, Mao, Enver Hodja est non seulement amnistié, mais devient insensiblement aujourd’hui une preuve de sympathique bon sens politique. Hitler, c’est trop tôt, parce qu’on n’a pas encore la certitude qu’il était de gauche, mais les recherches sont en cours. »

    J’ai très bien lu en effet, je ne sais pas ce qu’il vous faut ! Sa détestation de l’extrême-gauche est telle qu’il met tout le monde dans le même sac (c’est son problème et puis je m’en fous parce que je ne suis pas communiste). Moi, personnellement, je ne suis pas sympathisant d’extrême-gauche, la plupart des altermondialistes me sortent par les trous de nez ; mais je suis bien de gauche et pourtant, je ne parviens pas à croire à cette social-démocratie libérale que nous vendent ces pitoyables socialistes (soit-dit en passant, comment croire à cette gauche qui communique sur le résultat de sa pseudo-démocratie interne alors que les banlieues brulent ? Sur le plan de l’indécence, Fabius, Hollande et compagnie vont pouvoir voter une motion unitaire !). Pour ce qui est d’avoir peur de cette social-démocratie, c’est là un argument qu’on a trop entendu chez les ouistes : les nonistes sont des gens qui ont peur ! Voilà un beau déni de la capacité des opposants à mener une réflexion : Val n’a pas arrêté de le faire, et vous ne m’en voudrez pas de penser qu’il y a un peu de mépris là-dedans.

    Sur Jospin, je trouve qu’il s’en sert de façon malhonnête pour taper sur les gens qui votent mal. S’il a mauvaise conscience d’avoir voté Chirac en 2002, qu’il aille voir un psy au lieu d’insulter les autres. Là aussi je m’en fous, je me suis abstenu, et je referai pareil dans le 2ème tour Sarko-La Pen en 2007 !

    Sur la minorité, je dénonce simplement un mécanisme ultra-connu : l’autocrate qui se transforme en victime une fois qu’il est tombé de son trône. On l’a vu avec bien des dictateurs africains, des anciens nazis, des politiques corrompus etc. (je ne compare pas Val à ces gens sur le fond, juste sur le macanisme). Mais de toutes façons, les élites médiatiques qui ont tenu le oui à bout de bras ont toujours la majorité sur les ondes : rien n’a changé en fait. Mais pour les gens qui ont voté oui, c’est différent : ce sont des citoyens qui prennent part au débat à égalité avec ceux qui ont voté non ; ce clivage était de toutes façons artificiel.

    Bon allez, sans rancune. A bientôt.

> Post-referendum, animal triste
mardi 14 juin 2005
par  Cédric
Il y a quelque chose de comique ou pathétique dans votre article, surtout dans un blog qui s’intitule "responsabilité individuelle/collective". Vous ne supportez plus les éditos de Val, bien à vous, je ne les supportais pas quand il était prétenduement à gauche, je ne les lie pas plus depuis qu’il est devenu hypothétiquement de droite. Mais là n’est pas le propos. Il accuse les "nonistes" d’être aussi ouvert d’esprit qu’un carteron de staliniens, mais force est de constater que l’animal à bien raison quand vous ne pouvez plus supporter de lire les articles d’un journaliste qui ne relaierait pas votre opinion, qui ne vous caresserait pas dans le sens de vos convictions. Il est "coupable" d’une dérive droitière, de mal-pensance, d’appartenir à "l’élite" (houuu, le vilain mot). Vous auriez une solution fort simple, en responsabilité, qui consisterait à ne plus lire ces articles. Mais là où vous atteignez les sommets de l’absurde c’est quand vous parlez de l’élection de 2002. Le bilan emploi de Jospin était-il mauvais ? Les 1 millions de chômeurs en moins n’existaient-ils pas ? Qui a obligé l’électeur à faire des choix "à la con" (c’est une opinion personnelle) au premier tour, nous conduisant au non-choix du 2ème ? Mais biensûr, dans le blog de la responsabilité individuelle on dit "c’est pas moi, ce sont les autres". Donc ce ne sont pas les électeurs, paraît-il de gauche, qui ont permis ce grand moment de démocratie mais bel et bien Jospin (aidé sans doute d’ôdieux sociaux-démocrates) qui ont bourré les urnes. Un seul mot définit l’ensemble de cet article : pathétique.

    > Post-referendum, animal triste
    mardi 14 juin 2005
    par  Pierre-Jérôme Adjedj

    Bien d’accord avec vous, il y a quelque chose de pathétique dans cet article (pour le comique, je suis moins sûr). Mais nous ne sommes probablement pas d’accord sur ce qui l’est...

    Déjà une petite précision sur la notion de responsabilité individuelle : cela ne signifie pas « chacun fait ce qui lui plaît et s’écarte de ce qui lui déplait », mais désigne un positionnement individuel en relation avec la marche globale de la société. C’est bien là le rapport entre responsabilité individuelle et collective, et cela relève du débat, voire du combat.

    Venons-en à Philippe Val. Ce que je lui reproche (et croyez-bien qu’il s’en fout), ce n’est pas son positionnement pour le oui, chacun étant bien sûr libre de ses opinions, mais bien la manière dont il a conduit ses articles écrits et radiophoniques, exploitant les arguments les plus malhonnêtes (comme beaucoup de ses confrères, il est vrai). Contrairement à ce que vous pensez, je n’ai pas besoin d’être caressé dans le sens de mes convictions, parce que mon travail de réflexion, aussi nul soit-il, est très autonome, construit, et souffre ne vous en déplaise la remise en question. Ce dernier point me différencie notamment de Philippe Val.

    - Sur l’élite : ce terme galvaudé mérite, vous avez raison, une explication. Je ne l’entends pas au sens de l’élite possédante ou encore de l’élite intellectuelle, qui existent toute deux, mais plutôt d’un troisième cercle, plus « cosmopolite », qui rassemble pêle-mêle politiques, vedettes, journalistes, intellectuels (ou pseudo-) etc. le tout sous l’oeil de la caméra ou l’oreille du micro. Une élite médiatique, si vous voulez, qui a un pouvoir exagéré (mais faillible, on l’a vu), et sûrement moins de légitimité que les deux premières. Ne voyez donc dans cette appellation aucun poujadisme.

    - Sur 2002. Aaaaaaaah, voilà un sujet qui me passionne, moi qui n’ait pas voté Jospin au premier tour, ni Chirac au deuxième. Je vous l’accorde, le bilan emploi de Jospin était excellent, même si le devenir funeste des emplois créés doit autant à leur statut précaire (je suis un ancien emploi-jeune, je sais de quoi je parle) qu’à la politique antisociale de la droite ! Mais le reste de son bilan est moins reluisant, notamment ce record de privatisations qui laisse pantois chez un homme de gauche, tant il est en accord avec une vision libérale de la société. De plus, et c’est peut-être le pire, Jospin a systématiquement instrumentalisé les composantes de sa gauche plurielle (dont je ne suis pas vraiment sympathisant, et encore moins électeur !), à son profit croyait-il. Il a pratiqué un jeu cynique jusqu’au moment où il croyait avoir partie gagnée sans les copains. Sa responsabilité, c’est donc d’avoir joué ce « jeu de con » qui a émietté les votes de ceux qui ne voulaient pas de ça. La mienne, de responsabilité, c’est d’avoir pris le risque de faire passer la droite (ou pire) plutôt que de cautionner Jospin. Parce que la tactique du moindre mal systématique, on voit où ça nous mène. Pour tout vous dire, au deuxième tour, j’aurais préféré le chaos d’un Chirac passant avec 50,1% et 70% d’abstention, pour obliger les partis à se remettre en question et par là-même au boulot. Au lieu de ça, le moindre mal des gens de gauche, c’était le 82% et la promesse risible d’un troisième tour social qui n’eut jamais lieu. Soit-dit en passant, quelques notions de droit constitutionnel vous apprendraient que Le Pen élu n’aurait pu en aucun cas gouverner, sauf ralliement massif des élus de droite ou soulèvement de l’armée, deux choses qu’on espère improbables, tout de même ! On aurait donc eu droit à la honte vis-à-vis de l’étranger (juste retour des choses après le boycott pour un Haider peu dangereux, rapporté à une coupable indulgence à l’égard de Berlusconi) et une crise constitutionnelle en règle, laquelle arrive de toute façon à grands pas...

    Désolé, mais ce qui me sépare du Philippe Val actuel (et probablement de vous), c’est l’espoir d’un monde qui n’est conduit ni par les « utopistes puristes » inaptes à l’action, ni par ceux dont « la volonté s’attarde un peu trop dans le royaume des moyens et qui [prennent] goût à ce séjour, jusqu’à en oublier la fin dont ces moyens sont les moyens » (Jankélévitch). C’est l’espoir de pas mal de gens de gauche qui se retrouvent politiquement apatrides, faute de personnalité représentative pour porter leurs idées.

    Un petit mot pour finir sur l’ouverture d’esprit des noniens : cherchez un peu plus loin que les médias dominants, et vous y trouverez des « intellectuels de l’élite », et pas seulement des désoeuvrés ouverts comme des staliniens moyens.

      > Post-referendum, animal triste
      mardi 14 juin 2005
      par  Cédric

      Concernant la définition de la responsabilité, une nuance devrait retenir votre attention : celle qui consiste à assumer ses actes et ses conséquences.

      Donc il s’agit de "l’élite médiatique", celle qui concentre ces derniers temps l’ensemble des critiques de ceux qui pensent bien, en accord avec le peuple, etc... Désolé, mais d’une part je ne vois ce qui vous permet d’en dénier la légitimité, une presse n’est jamais le fruit des urnes, pour autant elle peut avoir un avis, prendre des positions qui ne seraient pas mues par la seule volonté d’affirmer son pouvoir et par l’auto-intoxication d’un milieu. Elle peut être aussi le fruit de l’absence de perspective politique offerte par le non, entre les "anti" professionnels, les partisans d’une "grande ronde où tous les européens se donneraient la main en chantant l’internationale" à la Buffet, j’en passe et des meilleures.

      Concernant 2002, oh qu’il était méchant le Jospin. Il "instrumentalisait" ses partenaires. Avez-vous assisté à la même campagne que moi ? J’ai des doutes. Il fut la première cible de ses sémillants partenaires, ceux qui n’assumeront jamais d’avoir eu une responsabilité gouvernementale comme au PC, ceux qui font cission avec eux-même (vert), ne parlons même pas des souverainistes avec lesquels cela sentait bon le règlement de compte entre le PS et ses ex-membres. Mais aucun de ces fameux partenaires "exploités" ne s’est souvenu que le bilan, soit insuffisant, soit ceci, soit cela, de Jospin c’était aussi le leur. Alors vous me parlez aussi des emplois-jeunes en connaissance de cause et des privatisations. D’une part, travaillant à l’ANPE, même si ces emplois n’étaient pas pérennes ils avaient un avantange conséquent pour les moins de 25 ans : celui de trouver un secteur où ils pourraient débuter dans la vie professionnelle et surtout avoir un revenu. Je ne vois que trop de gamins sans ressources puisqu’à cet âge ils n’ont même pas droit au RMI. Insuffisant le bilan Jospin, peut-être, mais quand je vois les chiffres du chômage dans cette tranche d’âge, je me dis que la politique du "moindre mal" elle permet aussi de bouffer. Concernant les privatisations : mais le marxisme est contre les monopoles qu’ils soient publics ou privées ! De plus, en vertu de quoi l’Etat-providence tel que définit par sa forme en 1945 constitue un idéal indépassable ? Vous croyez que les collectivités locales se souviennent avec des trémolos dans la voix des clauses léonines des contrats qu’elles devaient signer avec EDF ?

      Concernant Le Pen, je suis d’accord avec vous, il n’aurait pas pû appliquer son programme, mais compter sur un soulèvement de l’armée (vous êtes déjà allé dans la marine surnommée "la Royale" c’est un rendez-vous de progressistes), je ne sais pas ce qu’en pense Jankélévitch mais c’est assez rigolo. D’ailleurs, l’Autriche est un bon exemple. Si Haïder n’est pas au pouvoir, son parti l’est ! Il ne peut pas gouverner sans coalition (c’est le système autrichien qui veut ça), il n’applique pas son programme dans toute sa plénitude mais il l’applique. Alors vous pouvez toujours avoir un doute sur ce qu’il se passerait en France, je vous rappellerais juste que sur l’ensemble de la magistrature française, un seul de ses membres avait réfusé de jurer fidélité à Pétain. Il ne fut jamais réintégré et ses collègues ne furent jamais inquiétés à la libération. Normal, avec la même sérénité ils avaient présidé aux procés de l’épuration.

> Post-referendum, animal triste
samedi 11 juin 2005
par  ins

Bonjour,

Que dire du dernier édito de Val..... J’ai pensé à la réaction d’un gamin à qui on a cassé un jouet...

Moi aussi je suis fan de la période font et val, mais ça semble si loin de lui maintenant.

Avec un ami nous sommes allés distribuer des tracts pour le NON au tce à l’entrée d’un de ses concerts dans la région toulousaine. les spectateurs assez peu nombreux venaient "à reculons" l’écouter : envie d’écouter le chanteur mais regrets très forts sur ses prises de position.

Pour la petite histoire, il a fait un meeting commun avec Gérard Onesta, député vert pour le oui et aussi vice président du parlement européen (très connu localement)....il y avait moins de 100 personnes.

voila quelques mots....

amicalement

Jacques



> Post-referendum, animal triste
mercredi 8 juin 2005
par  Fulcanelli

Bonjour Pierre-Jérôme, effectivement, l’après 29 mai engendre la déprime, même pour les partisans du NON, agacés de voir tous ces commentaires et ces esquives des intellos et politique. Il existe un populisme des élites, une beauferie sans idées mais quelques artifices intellectuels

Extrait de mon blog

"La comédie politique suit son cours naturel. Les Jacobins Delanoë, Hollande, Djack et les autres ont décidé de couper quelques têtes mal pensantes de la direction du PS. 2005 a été une Révolution dans les urnes. Un peu de Commune, de mai 68 et de 1789. Serge July a été qualifié de versaillais. Danton Fabius, Marat Emmanuelli, et Robespierre Mélanchon sont en première ligne. Le numéro deux du PS a été balancé. Le bonapartiste de Villepin devrait assurer l’intendance du pays. Mais on ne sait pas qui est le premier Consul ? Notre rimbaldien croyant vaincre le chômage en bataillant sur le pont d’Arcole législatif, où bien notre pragmatique Sarkozy qui délaissant le code civil, s’attelle à prendre en charge la refonte du code du travail. Parce que les civilités ne sont plus d’actualité et que seule l’économie intéresse nos politiques."

"2005 n’a pas été un tsunami mais le contraire. La mer se retire peu à peu, et sur le sable se dévoile l’état de notre société. Le visage d’un avenir incertain n’a jamais été aussi présent. C’est un signe inquiétant parce que les temps risquent d’être durs mais aussi d’espoir parce que dans une situation de danger, les solutions qui sauvent peuvent émerger. En tous cas, je ne souhaite ni une comédie de terreur décadente comme au PS, ni une prise en charge jacobine et bonapartiste de la nation. Le NON doit être l’antichambre de l’invention et d’une renaissance citoyenne. La société sera culturelle ou bien elle ne sera pas vivable !"

Cordialement



http://www.u-blog.net/Fulcanelli
    > Post-referendum, animal triste
    mercredi 8 juin 2005
    par  Pierre-Jérôme Adjedj

    merci pour ton message, Fulcanelli. Un petit regret toutefois (réparable sûrement) : tu n’a pas indiqué de lien vers ton blog. N’hésite pas, il faut que l’info circule.

    Juste un bien malheureux bémol à ton propos : je ne crois malheureusement pas que Sarkozy délaisse le code civil au profit( !) du code du travail. Il entend bien tenir les deux en même temps, un dans chaque main ! Leurs refontes respectives sont les deux mamelles de sa politique : politique qui est importée des Etats-Unis, inspirée plus précisément des méthodes de R.Giuliani sur la « tolérance zéro ». Je renvoie une fois de plus (parce que ce bouquin est marquant) vers « Punir les pauvres : Le nouveau gouvernement de l’insécurité sociale » de Loïc Wacquant.

    Le livre montre hélas comment la société de marché entend maintenant se débarasser de ses pauvres, inutiles et autres improductifs : par la criminalisation et la judiciarisation. Aux Etats-Unis, ça marche très bien, les prisons sont pleines. Donc, Répression, Travail et Economie sont étroitement liés.

    Et dire qu’il se trouve des gens prétendument de gauche pour trouver que Sarkozy n’est pas dangereux, simplement un peu ferme...

      > Post-referendum, animal triste
      mercredi 8 juin 2005
      par  Fulcanelli

      Voilà le lien. Je l’avais mis dans le commentaire précédent en oubliant de remplir une case.

      Sinon, oui, Sarkozy pourrait être dangereux. Quant aux pauvres, il se trouve que le calcul économique fait que leur criminalisation coûte apparemment moins cher que leur formation et insertion.



      Fulcanelli
> Post-referendum, animal triste
samedi 4 juin 2005
par  cafeducommerce

J’avais raté Val, mais je me suis fait July !...

Vous voulez mon opinion ? Val est stipendié par le Mossad. Je ne vois pas d’autre solution : quel que soit le problème, depuis quelque temps, il nous ramène Auschwitz ! Ou s’il n’est pas payé, il est vraiment très bête - quel rapport avec le TCE ?

Pour le reste, je suis dans l’ensemble d’accord avec vous - mais réécoutez les disques : à l’époque, c’est Font qui était drôle, Val était déjà bien donneur de leçons. Comme il était dans le "bon" camp, ça gênait moins, à tort. Comme dit l’autre : "stalinien un jour, stalinien toujours !"

Cordialement,

AMG.



cafeducommerce